Si fortement rêvé ton corps
Dépossédée de nos étreintes
je me drape dans les fils d'or
tissés de mémoire d'absinthe
Sur l'ombre insistante que préfère la nuit
scintille la verdeur du pré à l'herbe rase
un soleil tout pareil aux ténèbres s'unit
à la mauve clarté d'une aube qui s'abrase
Si fortement dépris ton corps
au songe livré de ma crainte
navigue au royaume des morts
sous l'astre noir du labyrinthe
Mes doigts n'effleurent que schèmes évanescents
aux allures séduisantes de crinoline
je fouille l'espace qui désapprend le temps
sur l'ocre feuillage des arbres Caroline
Si fortement épris nos corps
fuient dans la pourpre chavirante
du glauque et paisible décor
à la tendresse délirante
Je m'érafle aux signes de nos râles chantants
aux âpres candeurs des caresses me vautre
défile la grisaille incendiée d'antant
en épousant ta vie je n'épouse que l'autre
Si fortement rivés nos corps
à la belle et folle échappée
dans les éternités d'accords
de galactiques épopées
Jeanne Talbot-David, Les Délices de Pradoux, Poèmes, Les Editions Geneviève Pastre, Collection les Octaviennes, Paris, 1995.
Photographie : Vincent O Byrne