Pourquoi discrimine-t-on encore les femmes ?
par Lucie Poirier
Michèle Viroly travaillait à la télévision de Radio-Canada depuis de nombreuses années, elle aurait pu remplacer Bernard Derome au bulletin de nouvellles du soir. Traditionalistes et misogynes, les dirigeants de la Société Radio-Canada l’ont évincée et ont prétendu être audacieux en catapultant les cheveux blancs de Gilles Goujon au Téléjournal et une émission de variétés à 18 heures pour confirmer que c’est là que doit rester la place d’une femme : être jeune et déblatérer des frivolités. Finalement, ils ont supplié Derome de revenir au Téléjournal.
Gaspillage et une perte pour l’information.
Pauline Marois œuvrait au Parti québécois depuis de nombreuses années, elle aurait pu en assumer la chefferie. Traditionalistes et misogynes, les membres du Parti ont voté pour un homme inexpérimenté. N’importe qui plutôt qu’une femme. Élu, André Boisclair déclare : « Jean Charest me fait penser à un poisson rouge dans un bocal », c’est ainsi qu’il continue l’articulation de son argumentation.
Recul et une perte pour la politique.
Andrée Ruffo s’acharnait depuis de nombreuses années à critiquer, transformer, réclamer, pour que des enfants victimes de leur famille, négligés par la société et maltraités, enfermés, surmédicamentés, grâce à notre DPJ, soient enfin véritablement aidés. Alors que le misogyne juge Bienvenu ne s’est jamais excusé d’avoir insulté des femmes, alors que des juges qui étaient saouls pendant des procès et/ou qui ont contribué à la marchandisation humaine avec des prostituées de salons de massage n’ont jamais perdu leurs privilèges, la juge Ruffo a frôlé la destitution, fait une dépression et a été poussée à la démission. Rappelez-vous la ministre qui ne pouvait rester deux minutes dans une cellule où la DPJ a l’habitude de séquestrer des enfants pendant des heures ; elle reproduit trop bien les convictions traditionalistes pour être contraintes à la démission, elle. Les enfants se retrouvent sans passionaria pour exiger qu’on prenne soin d’eux et qu’on les secoure. Danger et perte pour la justice.
Les femmes sont tolérées quand elles cautionnent la mentalité misogyne et qu’elles copient les comportements traditionalistes ; quand elles sont et font comme les hommes.
Mais celles qui persistent à acquérir de l’expérience et qui veulent agir ne peuvent mener à terme leurs accomplissements. Lorsque certaines y parviennent ce n’est pas sans conséquences (comme des punitions, des humiliations) ni sans risques (comme ces Afghanes qui enseignent et soignent en cachette au péril de leur vie si elles sont découvertes).
Pourquoi refuser de donner de la crédibilité à une parole exprimée par une femme, d’accorder du pouvoir à une initiative proposée par une femme, de favoriser l’influence d’un changement voulu par une femme ?
Pourquoi dans l’Histoire de l’Humanité parvient-on à aller au-delà du racisme, de l’homophobie mais pas de la misogynie ?
Pourquoi discrimine-t-on encore les femmes ?
Pourquoi rejette-t-on leurs contributions à un monde où il importe de dire par l’information ? Pourquoi abolit-on leurs apports à un monde où il est tellement nécessaire de décider par la politique ?
Pourquoi empêche-t-on leurs possibilités dans un monde où il faut pourtant améliorer par la justice ? Pourquoi ? Nous sommes dans le besoin et on nous prive.
Mis en ligne sur Sisyphe, le 26 mai 2006